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La cible si parfaite d'Erdogan

C'est peut-être difficile à croire vu d'Europe, mais la gigantesque purge déclenchée par le président Recep Tayyip Erdogan suite à la tentative de coup d'Etat du 15 juillet est soutenue par une grande partie des Turcs. Peu importe qu'ils soient convaincus ou non de la culpabilité du mouvement Hizmet que dirige le mystique soufi Fethullah Gülen depuis son exil aux Etats-Unis. Nombreux sont ceux qui se méfient de ce réseau tentaculaire qui s'est infiltré dans toutes les strates de la société anatolienne.

Certes, la population est inquiète. Comment le pays sera-t-il géré après le licenciement, en une dizaine de jours, de plus de 50 000 fonctionnaires? Manquera-t-on d'enseignants à la rentrée scolaire? Le système judiciaire sera-t-il durablement perturbé, alors que plus de 2800 juges et procureurs sont en garde à vue? Les journalistes oseront-ils encore faire leur travail en toute objectivité, après la fermeture de 130 médias et maisons d'édition? L'armée, privée de la moitié de ses généraux et amiraux mais aussi de 1099 autres officiers, pourra-t-elle faire face à des attaques des rebelles du PKK ou des djihadistes de Daech?

Pour autant, la foule n'est pas immense quand il s'agit de manifester pour défendre les «gülénistes». Les laïcs ont peu d'empathie à l'égard de ce mouvement islamiste qui réintroduit des valeurs religieuses au sein des institutions de la République… et qui enseigne son idéologie dès l'enfance grâce à une multitude d'écoles privées. Les Kurdes, eux, n'ont pas oublié que des juges liés à Hizmet ont jadis dévoilé les pourparlers secrets entamés par Erdogan avec le PKK. C'est ce qui brisa l'alliance entre le maître d'Ankara et le leader soufi. Les partisans du président turc, eux, sont évidemment fidèles. Mais même le Turc lambda, sans affiliation, se méfie de ce réseau jugé manipulateur. Bref, Erdogan s'en prend à la cible parfaite, formidable marchepied vers un pouvoir sans partage.