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L'illusion du Brexit heureux

Par Guillaume Maujean

Publié le 6 oct. 2016 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Il flottait cette semaine à Birmingham, au congrès des conservateurs britanniques, un curieux parfum d'euphorie. Theresa May a clarifié le calendrier du Brexit, en faisant savoir qu'elle enclencherait l'article 50 avant la fin mars 2017. Elle a adopté un ton résolument offensif, affirmant qu'elle garantirait aux entreprises « la liberté maximale de commercer au sein du marché unique ». Et ses troupes semblent désormais convaincues que le divorce avec l'Union européenne se fera dans les meilleures conditions pour un Royaume-Uni enfin « libéré », qui aurait repris son destin en main. « Ne serait-il pas délicieux d'inviter M. Juncker à venir à Westminster nous demander de signer un accord de libre-échange et que, pour venir, il ait besoin d'un visa ? » a fanfaronné un député tory sous les hourras de l'assistance. Le résultat du référendum doit évidemment être respecté. Mais le Brexit, faut-il le rappeler aux Britanniques, sera tout sauf un tapis de roses. L'économie ne s'est pas effondrée au lendemain du vote du 23 juin, la chute de la livre sterling ayant permis d'amortir le choc. Le plus dur reste pourtant à venir. L'accès au marché unique est incompatible avec la levée de la libre circulation des travailleurs que réclame Theresa May. Le rétablissement des droits de douane, la perte du passeport européen pour les financiers exerçant dans la City, la baisse probable des recettes fiscales, le recul des investissements sont autant de poids qui lesteront la croissance outre-Manche. Rompre les amarres avec l'UE ne peut se faire sans perdre plusieurs points de PIB. D'autant que Bruxelles n'a aucun intérêt à faire de cadeaux aux Britanniques, sous peine de créer un précédent. Les Européens gagneraient même à jouer la montre pour négocier une rupture claire et nette. Si « Brexit means Brexit », comme l'a affirmé la Première ministre, Juncker est en droit de lui rétorquer que « Hard Brexit means Hard Brexit » !

Pour l'heure, Theresa May ne semble guère s'en soucier, qui a mis de côté les intérêts économiques nationaux pour privilégier son dessein politique. Elle veut s'adresser aux « travailleurs ordinaires », met ostensiblement l'accent sur les questions migratoires, pour mordre à la fois sur le terrain du Labour et des populistes du Ukip, en pleine crise existentielle. Elle incarne une autre tradition qui a le vent en poupe, y compris en France, protectionniste et interventionniste. Une petite révolution pour les conservateurs, qui abandonnent leurs habits libéraux pour prendre des accents souverainistes. Avec même quelques relents nationalistes. On croit entendre Arnaud Montebourg ou Marine Le Pen dans les discours des ministres de Theresa May, faisant l'éloge des aides d'Etat ou exigeant des entreprises britanniques qu'elles listent leurs employés étrangers. La City a fait sa fortune sur son ouverture au monde. Elle a beaucoup à perdre à un repli sur soi.

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