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« L’échec de la trêve en Syrie serait celui de toute solution politique à un conflit vieux de cinq ans »

Pour le coordinateur des négociations de l’opposition syrienne l’alternative « Bachar ou organisation de l’Etat islamique » entretenue par le régime est démentie par les faits.

Publié le 11 mars 2016 à 14h22, modifié le 11 mars 2016 à 12h22 Temps de Lecture 4 min.

Par Riyad Hijab, coordinateur général du Haut comité des négociations de l’opposition syrienne

La proclamation d’une cessation des hostilités en Syrie a suscité un immense espoir. Le premier jour de l’entrée en vigueur de cette trêve, les canons soudain se sont tus dans de nombreuses régions qui vivaient depuis des années sous le fracas des bombes. En obtenant cette trêve après cinq années de guerre ininterrompue, l’opposition syrienne, désormais constituée en un Haut comité des négociations (HNC) représentatif des opposants au régime, a démontré sa crédibilité politique aux yeux de la communauté internationale. Le respect de cette trêve de quinze jours, devant permettre notamment l’accès de l’aide humanitaire aux villes assiégées, est une obligation qui incombe au régime avant la reprise des négociations politiques entre le HNC et les représentants du régime, sous l’égide de l’ONU.

À ceux qui lui ont reproché de ne pas être soudée ou de faire la part trop belle aux factions armées, l’opposition démontre sa cohésion et sa capacité à faire relayer sur le terrain par les factions armées sa position politique : tous les groupes qui constituent l’opposition respectent la trêve et la font respecter.

Cette trêve met aussi en lumière les contradictions du régime syrien et de son allié russe. En effet, au moment même où Bachar El Assad affirmait sur la chaîne de télévision allemande ARD vouloir mettre tout en œuvre pour assurer le respect de la trêve, son armée, soutenue par les forces russes, continuait de bombarder la résistance syrienne. En une semaine, tout en prétendant viser l’organisation Etat islamique et Al Nosra, l’aviation russe et celle du régime ont mené près de 100 raids meurtriers et tué près de 200 personnes dont la moitié sont des civils, y compris des femmes et plus de 20 enfants.

Cas d’attaques chimiques

Plus du quart des victimes est tombé sous les frappes aériennes à Homs, Idlib, Deir Ezzor, Dara, Alep, donc dans les zones tenues par la résistance syrienne modérée qui respecte la trêve et non par l’organisation Etat islamique ni Al Nosra. Des cas d’attaques chimiques au chlorine ont été relevés. Ces frappes ont permis aux troupes du régime de reprendre du terrain autour de Damas, en contravention avec les conditions de la trêve. Les forces russes ont massivement contribué à ces attaques malgré les engagements pris vis-à-vis des États-Unis.

Aucun décompte officiel de ces victimes et de ces violations n’est tenu par les organismes internationaux : nous avons pris l’initiative de faire ce décompte et de mettre en ligne le nom des victimes, ainsi que le lieu, la date et la cause de leur mort. Il est de notre responsabilité de rendre publiques ces informations macabres. Nous sommes disposés à partager cette tâche avec tout organisme qui en ferait la demande pour en attester la rigueur et la véracité.

Nous avons enregistré en outre l’entrée plusieurs centaines de nouveaux miliciens pro-iraniens en Syrie depuis la trêve. Ainsi, tandis que nous nous préparons à la négociation politique, tout indique que le régime se prépare à lancer de nouvelles attaques. Enfin sur le plan humanitaire, cinq régions seulement sur les 18 assiégées ont été partiellement ravitaillées. Plus d’un million de Syriens restent privés de denrées vitales.

Faire échouer la trêve, c’est faire échouer toute solution politique au conflit. Le régime et les Russes le savent. Le HNC a indiqué très clairement sa volonté de reprendre le chemin des négociations à Genève dès que l’émissaire de l’ONU l’aura décidé. Aujourd’hui, la reprise du processus de Genève dépend entièrement de ceux qui chaque jour violent la trêve conclue voici une semaine.

Nous avons prouvé notre confiance dans le processus de Genève et notre capacité à faire appliquer sur le terrain les engagements pris. Cela prouve qu’il existe bien en Syrie une organisation politique et militaire unie et efficace : l’alternative « Bachar ou organisation Etat islamique » dont le régime essaie de convaincre l’opinion publique internationale peut parfois avoir tendance à s’enfermer n’est plus vraie. Le discours de Bachar et des Russes consistant à assimiler l’opposition modérée, y compris dans sa composante modérée, avec les terroristes ne devrait plus convaincre personne. Il est au contraire désormais plus évident que jamais que les principaux responsables de la guerre en Syrie sont le régime de Bachar et ses alliés.

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Il est indispensable que les partenaires internationaux fassent respecter la trêve ou tirent toutes les conséquences de sa violation par le régime de Bachar El Assad. Nous restons convaincus que la transition démocratique est la meilleure solution pour mettre fin aux horreurs de cette guerre qui tue les Syriens ou les jette sur les routes. Il est de l’intérêt de toutes les nations, et notamment des États-Unis et de l’Europe, de peser de tout leur poids pour que les violations cessent et que les négociations puissent reprendre comme prévu. C’est aujourd’hui qu’il faut saisir cette chance. Après, il sera trop tard et le chaos l’emportera définitivement, sans qu’il soit possible de dire jusqu’où il nous entraînera tous.

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