Les moulinets de l'Elysée
De la part de François Hollande, ce n'est pas faire preuve d'un si grand courage que d'affirmer, comme hier sur Europe 1, qu'il « ne cédera pas » sur la loi travail. En se posant en réformateur qui ne se laisse intimider ni par les violences de rue ni par les frondeurs du PS, le chef de l'Etat veut se donner une posture avantageuse, celle d'un président ouvert au dialogue mais résolu ensuite à aller au bout de ses décisions. Soit. Mais reconnaissons que c'est largement un rôle de composition que s'invente là le chef de l'Etat. Car, enfin, à quoi serait-il censé « céder » ? A quelques centaines d'individus qui trompent leur ennui en campant place de la République à Paris ? A quelques milliers de professionnels de la manifestation, qui ont échoué à créer une mobilisation de grande ampleur contre un texte qui n'a rien de révolutionnaire ? Hier, dans le cortège parisien, force est bien de constater qu'ils n'étaient guère nombreux... Céder à des « frondeurs », enfin, qui représentent un électorat marginal, celui d'un socialisme radical ? A côté des manifestations monstres qu'ont pu affronter d'autres gouvernements, celles d'aujourd'hui s'illustrent surtout par les exactions qu'elles engendrent. En 2010, oui, il fallait du courage pour tenir face à la rue. En 2016, la partie n'est pas la même pour François Hollande, loin s'en faut. Ce n'est d'ailleurs pas étonnant, puisque la réforme El Khomri s'apparente davantage à des petits pas qu'à un grand soir social. Livrées aux anarchistes et aux casseurs, les manifestations n'ont bien souvent plus rien à voir avec les protestations contre la loi travail. Après le 49-3, cette dernière n'est plus le problème de Myriam El Khomri, mais celui du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. C'est moins l'ordre social qui est menacé aujourd'hui que l'ordre public.
Jean-Francis Pécresse