Edito: l’extrême droite a (de toute façon) gagné
Mais au fond, qu’il accède ou non au poste de chef de l’Etat, Hofer aura remporté une victoire, significative, pour le FPÖ – un parti qui, s’il a lissé son discours, compte en ses rangs des nostalgiques du IIIe Reich.
- Publié le 23-05-2016 à 06h56
- Mis à jour le 23-05-2016 à 12h01
Un édito d'Olivier le Bussy.
L’Autriche saura, ce lundi, qui du candidat soutenu par les Verts, Alexander Van der Bellen, ou de celui du parti d’extrême droite FPÖ, Nobert Hofer, a été élu président fédéral. Les 900 000 électeurs qui ont voté par correspondance les départageront, les résultats à la sortie des urnes accordant un infime avantage à Hofer, crédité de 51,9 % des voix.
Mais au fond, qu’il accède ou non au poste de chef de l’Etat, Hofer aura remporté une victoire, significative, pour le FPÖ – un parti qui, s’il a lissé son discours, compte en ses rangs des nostalgiques du IIIe Reich. C’est aussi un succès pour la nébuleuse des formations européennes d’extrême droite. Qu’un des leurs soit considéré, par la moitié d’un corps électoral, digne d’accéder à la tête d’un Etat, contribue à légitimer leurs idéaux nationalistes, autoritaires et xénophobes.
Chaque poussée électorale de l’extrême droite s'inscrit certes dans un contexte national particulier, mais les failles de la démocratie représentative, les promesses non tenues de l’Union européenne et de la mondialisation économique sont pour elle autant d’adjuvants. Sa progression est patente à l’échelle du continent : en France, au Pays-Bas, au nord et à l’est de l’Europe centrale, en Allemagne, et même en Belgique, où un parti au pouvoir intègre sans complexe des éléments du discours extrémiste.
Bien sûr, on n’en est pas (encore) au retour des milices, des bruits de bottes, ni des élus en uniforme dans les Parlements. Mais il faut être sourd et aveugle pour ignorer que la parole stigmatisante et discriminatoire se libère et ne pas voir que “l’Autre” est de plus souvent qualifié de fardeau ou de menace (même si c’est lui qui est menacé).
Ayant oublié ce que fut le pire, les Européens peinent à imaginer qu’il pourrait se reproduire. L’indignation ne suffira pas à l’empêcher, si elle n’accouche pas d’une action résolue pour éteindre ce qui nourrit l’extrême droite. Faute d’en prendre conscience, l’Europe glissera vers l’abîme. Lentement mais sûrement.