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Perturbateurs endocriniens : Bruxelles en faute

Editorial. La Commission européenne, qui était censée réglementer l’usage des polluants chimiques avant la fin de 2013, s’évertue à éluder le problème.

Publié le 21 mai 2016 à 02h08, modifié le 21 mai 2016 à 14h17 Temps de Lecture 2 min.

Traitement d’un champs aux pesticidesà Vimy (Pas-de-Calais).

Editorial du « Monde ». Cela fait des années que le feuilleton – l’inquiétant feuilleton – des « perturbateurs endocriniens » a commencé. Et il ne semble, hélas !, pas près de se terminer tant sont importants et contradictoires les intérêts en jeu, scientifiques, économiques, sanitaires, environnementaux et politiques.

Perturbateurs endocriniens ? Il s’agit de substances chimiques omniprésentes dans l’environnement domestique et la chaîne alimentaire (plastifiants, conditionnements, solvants, cosmétiques…). Elles envahissent nos activités et nos objets quotidiens, se dispersent dans l’environnement, et l’on détecte des matériaux censés entrer dans la composition de nos fonds de casserole et de nos tongs jusqu’au fond de l’océan Pacifique. Or, ces polluants chimiques diffus sont soupçonnés d’être en partie responsables de l’incidence croissante des maladies du monde « moderne » : cancers hormono-dépendants (sein, prostate, thyroïde…), troubles de la fertilité, obésité, diabète, autisme… Pourtant, ces perturbateurs ne sont pas régulés en tant que tels et cette faille réglementaire constitue un risque majeur pour la santé publique.

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L’alerte a été lancée par les scientifiques. Depuis un quart de siècle, les preuves de la nocivité de ces produits s’accumulent. En 2013, un rapport de l’Organisation mondiale de la santé et du Programme des Nations unies pour l’environnement les qualifait de « menace mondiale à laquelle il faut apporter une solution ». En 2015, encore, les sociétés de gynécologie et d’obstétrique de 125 pays ont mis en garde les pouvoirs publics sur les effets de ces polluants sur la santé reproductive.

Lobbying intense

Mise en demeure de réagir, la Commission européenne s’est, au contraire, évertuée à éluder le problème, à brouiller les expertises et à différer toute décision sérieuse. Elle était censée réglementer l’usage des perturbateurs endocriniens avant la fin de 2013. Soumise à un lobbying intense des industries des pesticides et de la chimie, elle n’en a rien fait. En novembre 2014, soutenue par la grande majorité des Etats membres et par le Parlement européen, la Suède a saisi la Cour de justice de l’Union européenne d’une action en carence contre la Commission européenne. En décembre 2015, cette Cour a jugé que la Commission avait « violé le droit de l’Union ». En janvier encore, c’est le président du Parlement européen, Martin Schulz, qui dénonçait le retard « inacceptable » de la Commssion.

Il est inacceptable que la puissance publique renonce à prendre et à imposer une décision sur un sujet d’intérêt général pour l’ensemble des citoyens de l’Union

Mais rien n’y fait. Invoquant expertises et contre-expertises, enterrant ce dossier dans le maquis bureaucratique bruxellois, l’enfermant dans l’opacité et le secret, résistant aux multiples admonestations – la dernière en date étant celle de la ministre française de l’environnement, Ségolène Royal, dans ces colonnes, le 21 mai –, la Commission continue à faire la sourde oreille.

Le problème n’est pas que l’industrie défende ses intérêts, qui se chiffrent en milliards d’euros, mais il est inacceptable que la puissance publique renonce à prendre et à imposer une décision sur un sujet d’intérêt général pour l’ensemble des citoyens de l’Union. Cela fait maintenant trois ans que la Commission a confisqué la discussion. L’extrême technicité des dossiers traités à Bruxelles éloigne les citoyens de toute possibilité de participation. Elle dépolitise des questions pourtant éminemment politiques. Le « déficit démocratique » européen est aussi là, dans cette incapacité à intégrer l’état de la science dans les choix politiques.

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