Mélenchon rebat les cartes de la présidentielle

Deux semaines avant le premier tour des présidentielles françaises, le candidat de gauche Jean-Luc Mélenchon et le conservateur François Fillon sont tous deux crédités de 18 pour cent des intentions de vote. Devant eux, Marine Le Pen du FN et Emmanuel Macron, à la tête du mouvement En marche!, sont au coude à coude avec 22 pour cent. Les commentateurs envisagent une présence de Mélenchon au second tour comme un cauchemar, indissociable du déclin des partis traditionnels.

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Il Sole 24 Ore (IT) /

Des promesses irréalistes

C'est avec une grande ingéniosité que le candidat de gauche promet aux Français le paradis sur terre, souligne Il Sole 24 Ore :

«Jean-Luc Mélenchon est un orateur d'exception qui sait comment s'y prendre pour enjôler les masses. ... Bien qu'il soit le plus âgé des candidats, il ne recule devant aucun des moyens que la technologie met à sa disposition. ... Il a par exemple lancé vendredi dernier le jeu en ligne Fiscal Kombat dans lequel Mélenchon en héros part à la chasse des nantis pour récupérer des fonds destinés à financer son programme. Et les sommes en jeu ne sont pas dérisoires : plus de 200 milliards pour abaisser à 60 ans l'âge de la retraite et à 32 heures le temps de travail hebdomadaire, offrir une sixième semaine de vacances, embaucher 60.000 enseignants et 200.000 fonctionnaires, revaloriser le SMIC de 16 points et obliger l'Etat à donner du travail à tout le monde. Sans parler de l'idée effarante d'une économie nationale dirigée, garante selon lui de la 'révolution des citoyens contre la monarchie présidentielle'.»

Süddeutsche Zeitung (DE) /

Un duel Le Pen-Mélenchon au second tour, le cauchemar de l'UE

Süddeutsche Zeitung attire l'attention sur les points communs entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen :

«Tous deux diabolisent la mondialisation, ont une bien mauvaise opinion des réformes économiques libérales, pestent contre l'Allemagne et maudissent l'UE sous sa forme actuelle. Mélenchon est certes plus supportable que Le Pen en ceci qu'il n'attise pas la haine xénophobe. Ceci mis à part, les similitudes de leurs campagnes sont frappantes. Jusqu'à présent, les Européens convaincus pensaient que Le Pen était le seul grand danger de ces présidentielles. Voici que Mélenchon se propulse sur le devant de la scène avec une campagne pugnace. De quoi faire vaciller l'espoir de nombreuses personnes, en Allemagne et dans l'UE, de voir le candidat de centre-gauche Emmanuel Macron l'emporter sur Le Pen au second tour et entrer à l'Elysée. Soudain, un second tour opposant Le Pen et Mélenchon ne semble plus complètement exclu. Pour l'UE, c'est le pire scénario envisageable.»

The Guardian (GB) /

La grogne contre les élites renforce les outsiders

Les partis traditionnels français n'avaient jamais été autant boudés par les électeurs, constate The Guardian :

«A présent, ce sont trois 'outsiders' qui caracolent en tête des sondages. La somme de leurs intentions de vote au premier tour représente deux tiers de l'électorat. Ceci reflète l'effondrement des partis d'après-guerre de droite et de gauche en France. Ils sont poursuivis par leur échec, pendant des décennies, dans la lutte contre le chômage. Si le taux national est de dix pour cent, il atteint même 24 pour cent pour les 18 à 25 ans. Paradoxalement, le fossé entre riches et pauvres est resté moins marqué en France qu'en Grande-Bretagne, en Allemagne ou aux Etats-Unis. L'Etat social français a partiellement amorti le choc de la crise financière de 2009. Mais l'indignation suscitée dans le peuple par les élites parisiennes et les scandales financiers a rendu la situation encore plus explosive.»

Le Monde (FR) /

Mélenchon se dirige vers l'impasse

La création d’une VIe république dotée d’une chambre parlementaire unique est une promesse de campagne centrale de Mélenchon. Une entreprise illusoire, juge le juriste Serge Sur dans Le Monde :

«Ou bien il propose le changement de République par référendum après son élection, référendum qu’il a toutes chances de perdre car les Français ne sont pas prêts à un saut dans l’inconnu. Que fera-t-il alors ? Démissionnera-t-il comme l’a fait de Gaulle, auquel Mélenchon se réfère de plus en plus ? Ou bien il essaie de sortir de la légalité, en convoquant sans base juridique une Constituante improbable, et alors gare au chaos institutionnel ! … La France a mieux à faire que d’ouvrir d’inutiles débats institutionnels, alors que la Constitution est aujourd’hui l’un des piliers qui soutiennent le pays.»