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Les marchés plongent, comme dans les livres

Les banques centrales l'avaient dit, elles l'ont fait. La conjoncture se ranimant un peu partout et l'inflation pointant le bout de son nez, les conditions fixées se trouvent enfin réunies pour enclencher le resserrement monétaire annoncé.

Le mouvement a commencé aux États-Unis, où le comité d'open market de la Réserve fédérale (FOMC) a pris le 13 décembre dernier, à une claire majorité, la décision de relever de 1,25% à 1,50% le taux cible des fonds fédéraux, et de mettre en branle pour cela les différents instruments à disposition de la Fed (opérations d'open market, taux d'escompte, réserves obligatoires).

Le resserrement monétaire et ses conséquences auraient dû logiquement être anticipés

La Banque centrale européenne, plus prudemment, a pris le parti de maintenir à 0% son principal taux de refinancement et de continuer d'appliquer un intérêt négatif de 0,40% sur les réserves excédentaires des banques. Mais elle a décidé parallèlement de réduire de moitié, à 30 milliards d'euros, ses rachats mensuels de dette publique et privée.

Dans un contexte européen de reprise avérée, mais encore fragile, de la croissance, le signal est sans ambiguïté: malgré les propos rassurants du président Mario Draghi, la BCE est dorénavant engagée sur la voie d'un relèvement progressif des taux d'intérêt. La même prudence, mais la même direction aussi, s'observe du côté des autres grandes institutions, Banque du Japon et Banque d'Angleterre (et demain, peut-être, la BNS). Partout se vérifie ainsi ce que l'on peut lire dans les manuels de politique monétaire: lorsque le retour au plein-emploi des facteurs se dessine, il est temps pour les banques centrales de renverser la vapeur.

Du coup, les marchés boursiers, qui pour saluer le redressement conjoncturel avaient débuté l'année en fanfare, ont reculé tout aussi brusquement, plongeant en quelques jours dans des proportions que l'on avait plus vues depuis 2009, ramenant les indices à leurs niveaux de mi-novembre 2017.

S'agit-il d'un retour à la normale? Dans un monde de normalité, on pourrait le dire. Mais la vérité est plutôt que le monde s'est mis à marcher sur la tête. N'observe-t-on pas que le dollar baisse alors que les taux montent, tout comme, peu auparavant, il avait monté alors que les taux baissaient? Cette inversion complète des relations ordinaires nous montre, si besoin était, combien les politiques extraordinairement expansives des banques centrales (les taux négatifs, le «quantitative easing») ont perturbé les grands équilibres et dérouté les marchés.

Le resserrement monétaire et ses conséquences sur les taux étaient prévisibles de longue date et auraient dû logiquement être anticipés. Or les Bourses avaient fait mine d'ignorer la chose et avaient continué de monter. Et voici que, patatras, elles chutent lourdement, comme si elles se trouvaient soudainement exposées à l'inattendu. Alors de deux choses l'une. Soit, cyniquement, une majorité d'investisseurs jouaient au bal de Cendrillon et attendaient minuit mois cinq pour sortir de la danse, soit ils s'imaginaient, à tort, que la rémunération nulle de l'épargne, désormais bien installée, était partie pour durer. Suivons la cote ces prochains jours: l'avenir immédiat nous dira laquelle des deux hypothèses mérite d'être retenue.