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Triste A380

EDITO + PODCAST - Airbus fait un choix économique rationnel en tuant son gros porteur. Mais cette défaite de l'Europe est plus qu'inquiétante tant la Chine et les Etats-Unis arrivent, eux, à investir dans des projets très risqués.

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(Dessin de Fabien Clairefond pour « Les Echos »)

Par David Barroux

Publié le 15 févr. 2019 à 09:41

La messe est dite. Et elle est bien triste. En prononçant, à la veille de son départ de la direction d'Airbus, l'oraison funèbre de l'A380, Tom Enders a fait un choix économiquement rationnel. Apprécié des clients mais boudé par les compagnies aériennes , le très gros porteur européen n'a jamais trouvé son marché.

Machine à générer des pertes à court terme, il n'avait, en plus, que peu de chances de redécoller à moyen terme. Pour qu'un jour des transporteurs aériens puissent faire le choix de parier à nouveau sur l'A380, il aurait fallu qu'Airbus et ses partenaires motoristes acceptent de réinvestir massivement dans une nouvelle version à la fois moins gourmande en carburant et pouvant transporter encore plus de passagers ou de fret. Le pari aurait été risqué. Et le jeu n'en valait visiblement pas la chandelle.

A l'heure d'arrêter les frais et de faire les comptes, on peut certes se demander pourquoi il convenait absolument aujourd'hui de débrancher un programme qui a fait perdre 20 milliards d'euros à Airbus en une vingtaine d'années. L'avionneur ne pouvait-il pas accepter de perdre quelques dizaines de millions de plus pour se donner une dernière chance ? A-t-il tout fait pour continuer de séduire Emirates, le premier client de l'A380 ? Ne pouvait-il pas se donner encore un peu de temps pour étudier la possibilité d'un vaste partenariat stratégique avec la Chine, un pays qui rêve de monter en compétence dans l'aéronautique et qui dans les décennies qui viennent va avoir besoin de doper dans des proportions gigantesques la capacité de ses compagnies aériennes ?

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L'équation économique et technique était sans doute trop complexe à résoudre et Airbus peut toujours se rassurer en se disant que ses futures versions d'A350 permettront de répondre pour l'essentiel à la demande en gros-porteurs. L'industriel peut aussi se dire que l'argent économisé permettra d'investir dans de nouveaux projets stratégiques comme la future génération d'A320. Le renoncement d'aujourd'hui financera peut-être des victoires demain.

Mais on ne peut aussi s'empêcher de regretter que l'Europe tourne une fois de plus la page d'un projet hors normes. Amazon, Tesla, Space X, Netflix, Alibaba, Huawei et tant d'autres des nouveaux géants mondiaux sont nés de projets fous au départ qui ont perdu de l'argent pendant des années mais qui finiront sans doute par payer et qui auront totalement rebattu les cartes dans leur univers. En dépit de la dictature des marchés financiers, les Américains et les Chinois ont retrouvé le sens du temps long. L'Europe peut-elle en faire autant ?

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VIDEO - Les 4 raisons de l'arrêt de l'A380

David Barroux

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