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L’irruption brutale du changement climatique dans la campagne électorale allemande

EDITORIAL. La tragédie due aux inondations en Rhénanie-Palatinat et en Rhénanie-du-Nord-Westphalie a fait plus de cent morts. Elle pourrait cyniquement avantager les Verts et saper les chances du chrétien-démocrate Armin Laschet, appelé à succéder à Angela Merkel

Près de Cologne, une portion de village s’est littéralement effondrée suite à un glissement de terrain.  — © Keystone
Près de Cologne, une portion de village s’est littéralement effondrée suite à un glissement de terrain.  — © Keystone

Il est des événements météorologiques qui influencent de façon significative les campagnes électorales. On l’a vu en 2002 avec le chancelier allemand Gerhard Schröder qui, droit dans ses bottes, avait compris l’importance de sa présence sur les lieux de graves inondations le long de l’Elbe. L’ouragan Sandy, en 2012, avait non seulement aidé à la réélection de Barack Obama, il avait aussi marqué un revirement de l’opinion publique américaine en faveur de la lutte contre le changement climatique. La tragédie humaine qui frappe l’Allemagne – la pire catastrophe naturelle que le pays ait connue depuis 1945 – fait partie de ces événements qui ne seront pas sans conséquences.

Sur les intempéries en Allemagne:

Angela Merkel en a rapidement pris conscience, interrompant sur-le-champ sa visite d’Etat à Washington auprès de Joe Biden pour exprimer ses condoléances aux victimes et rappeler l’importance de la lutte en faveur du climat. Que le changement climatique soit en partie responsable ou non des graves intempéries qui ont dévasté les Länder de Rhénanie-Palatinat et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie importe, mais n’est pas crucial. La perception qu’auront les Allemands de l’impact du réchauffement de la planète sera bien plus importante. Elle pourrait fortement influer sur les législatives allemandes du 26 septembre marquant la fin de l’ère Merkel.

«Une aubaine»

Pour les Verts, qui caracolent en deuxième position dans les sondages derrière la CDU, la tragédie est cyniquement dite «une aubaine». Après les errances de leur candidate Annalena Baerbock, empêtrée dans des affaires de plagiat, les Verts ont rapidement dû déchanter quant à leurs chances de placer pour la première fois une des leurs à la Chancellerie. Mais la menace du changement climatique fait irruption brutalement dans la vie des Allemands, qui vont peut-être exiger de leurs dirigeants une politique plus radicale en la matière.

Si Berlin a atteint cette année les objectifs prévus par l’Accord de Paris, c’est avant tout en raison de la pandémie de covid. Angela Merkel a certes fait le choix courageux de sortir du nucléaire et de planifier la sortie future du charbon, mais sa politique a résulté davantage d’une compréhension opportuniste de l’époque que d’une réflexion aboutie sur le climat.

Pour Armin Laschet, la catastrophe de ces derniers jours est une très mauvaise nouvelle. Le président de la CDU et candidat à la succession de Merkel est en décalage face aux enjeux climatiques. Celui qui dit vouloir diriger l’Allemagne comme son Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie a érigé de multiples obstacles à l’énergie éolienne et continue de prôner le recours au charbon jusqu’en 2038. Il vient de juger prématuré le plan climat de l’UE. La politique climatique qu’il propose est vague et sans ambition. S’il veut remplacer Merkel cet automne, il devra clairement revoir sa copie.