Un an après l’invasion de l’Ukraine, Vladimir Poutine ne dispose d’aucune autre option que la fuite en avant. Sur le champ de bataille, cela se traduit depuis l’automne par le harcèlement incessant de la population ukrainienne et le bombardement d’infrastructures civiles. Sur le champ rhétorique, le président russe s’embourbe dans les obsessions délirantes qui ont servi de prétexte au lancement de la guerre : l’Ukraine « néonazie », l’Occident « décadent », ou la pédophilie qui serait devenue « une norme » en Europe. Ces idées fixes, il les a une fois encore ressassées, mardi 21 février, dans un virulent discours à la nation dont l’objectif était moins de remobiliser les Russes que d’afficher sa détermination à l’international.

Cette posture n’est pas nouvelle. Depuis qu’il est revenu au Kremlin en 2012, Vladimir Poutine se fait le procureur de l’Occident. Il se présente comme le chantre de valeurs traditionnelles fantasmées, dont la nation russe serait, selon lui, une gardienne privilégiée. En septembre dernier, il est allé jusqu’à parler de la « mission libératrice de la Russie ». Il connaît les failles des sociétés européennes, les doutes qui les traversent, leurs inquiétudes identitaires ou culturelles. Mais il a sous-estimé leur capacité à se ressouder, dès lors qu’un régime hostile menace leurs libertés. S’il y a en effet un aspect civilisationnel dans le conflit russo-ukrainien, la ligne de front ne se situe pas entre le progressisme et le conservatisme, mais entre les démocraties et les régimes autoritaires. Tout le reste relève de la propagande grossière. C’est un moyen commode de dissimuler l’absence de stratégie d’un homme qui lutte essentiellement pour sa propre survie et celle de son régime.