AI Act : un sursaut d’intelligence collectif
Un édito de François Mathieu
- Publié le 13-03-2024 à 00h00
- Mis à jour le 14-03-2024 à 09h44
Une évidence : une entreprise qui n’investit plus est une entreprise qui se meurt. Autre évidence : l’intelligence artificielle, qu’on le veuille non, est incontournable. À l’ère numérique, et on peut le saluer, le Parlement européen vient d’adopter une nouvelle réglementation – l’AI Act, dont le contenu a fait l’objet d’un accord avec les États membres – qui devrait concilier ces deux constats. L’Union européenne (UE) se dote en effet d’un puissant cadre légal, le premier au monde, qui devrait faciliter le développement et la commercialisation de produits s’appuyant sur des technologies d’intelligence artificielle a priori accessibles au grand public (”open source”). Et enrayer ses dérives.
Cela peut profiter aux entreprises européennes. L’enjeu pour l’Europe est colossal. Alors que la productivité, l’un des moteurs de notre prospérité future, est en panne dans la plupart des États membres, ce recours balisé à l’intelligence artificielle devrait favoriser l’innovation, le développement de nouveaux processus industriels et de nouveaux services à haute valeur ajoutée.
Sans jouer les candides, en étant la première au monde à définir ce cadre légal, l’Europe prend pour une fois une longueur d’avance qui peut inspirer la confiance des investisseurs. C’est primordial, évidemment. Depuis la crise sanitaire et l’éclatement de la crise énergétique suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les énormes lacunes européennes sur le terrain industriel sont apparues au grand jour. L’Europe ne joue déjà plus le haut du classement, mais ce cadre légal peut lui permettre de retrouver une place de choix sur la scène économique mondiale. L’Europe n’a au fond pas tellement le choix. Des investissements importants ne sont pas seulement nécessaires pour assurer cette transition numérique. L’Europe doit aussi retrouver des marges pour faire face au défi du vieillissement de sa population. Pour le dire autrement, il faut trouver des sources de financement des dépenses de soins de santé et de retraite. Peu d’États membres sont préparés à ce choc. Et on ne parle pas des investissements à réaliser dans la transition climatique et dans la défense. L’intelligence artificielle est une opportunité. L’Europe l’a bien compris, c’est heureux. Reste à convertir l’essai, et faire en sorte que ce sursaut d’intelligence collectif ne soit pas superficiel.