Municipales moldaves : la Russie au cœur des débats

Le parti proeuropéen PAS a remporté les élections municipales en Moldavie avec plus de 40 pour cent des voix, même si des forces prorusses sont en tête dans plusieurs villes. Le processus électoral, plus encore que les résultats, fait débat : le service de renseignement moldave SIS assure que la Russie a affecté 4,5 millions d'euros à la manipulation des voix, tandis que l'OSCE a critiqué l'exclusion du parti prorusse Șansă juste avant la tenue du scrutin.

Ouvrir/fermer tous les articles
agora.md (MD) /

Sévir contre les financements douteux

On ne peut plus tolérer la prise d'influence sur les électeurs par le biais d'incitations financières, écrit Radu Burduja, cofondateur du think-tank Euro-Atlantic Resilience Centre, sur le portail agora.md :

«Des mesures décisives et des actions concrètes sont nécessaires pour briser ce cercle vicieux, dans lequel des voix sont accordées en contrepartie d'une rétribution financière, d'autant que ces fonds proviennent de sources douteuses et illégales. ... Les partis politiques doivent revenir sur la voie de la normalité et être financés de manière légale. Dans le cas contraire, les efforts en vue de renforcer la sécurité et la résilience de la Moldavie en resteront au stade des actions avortées et de la paperasse, dans les tiroirs des institutions publiques.»

Ukrajinska Prawda (UA) /

Deux vérités

Après le scrutin, l'avis d'Ukraïnska Pravda est partagé :

«Certains diront, à juste titre, que ces élections ont permis d'éviter à la Moldavie l'avènement d'agents prorusses à des postes clés. Tous les candidats du parti Șansă, financé par l'oligarque lié à la Russie Ilan Șor, ont été supprimés des listes en vertu d'un décret gouvernemental. ... Mais d'autres diront, à juste titre également, que ces élections se sont déroulées dans un mépris inédit des règles démocratiques. Car l'exécutif moldave a évincé ses concurrents deux jours seulement avant la tenue du scrutin, en prenant un décret dénué de tout fondement juridique, et en l'absence d'une décision du tribunal ou de la commission électorale.»

taz, die tageszeitung (DE) /

Des recours répréhensibles

Le pays reste profondément divisé, constate le quotidien taz :

«D'un côté, ceux qui considèrent que l'avenir du pays est en Europe ; de l'autre, ceux qui lorgnent vers Moscou. Ce sont ces derniers que la guerre hybride russe a visés de nouveau afin d'influencer les élections dans le sens de Poutine. Cela semble avoir fonctionné, du moins dans les villes d'une certaine taille. Il est compréhensible que le gouvernement veuille se prémunir de ces immixtions, mais les moyens utilisés posent question : récemment, des chaînes de télévision pro-russes et plusieurs sites Internet favorables au Kremlin ont ainsi été muselés. Un parti prorusse a été exclu du scrutin. Les critiques doutent que ce procédé soit acceptable au plan juridique. Ces objections doivent être prises au sérieux, et ce à Bruxelles également.»

Deutsche Welle (RO) /

La Moldavie régresse

Le maire prorusse de Chişinău, Ion Ceban, qui a été réélu, a bénéficié du soutien actif des sociaux-démocrates roumains du Premier ministre Marcel Ciolacu. Le service roumain de Deutsche Welle aurait préféré que ceux-ci prennent parti pour l'autre camp :

«Le fait que les méthodes russes de corruption des électeurs aient porté leurs fruits laisse penser que la population moldave peut être manipulée, voire qu'elle ne veut pas adopter un cap européen. ... Plutôt que de miser sur le candidat des Russes, dont le parti, d'après un rapport du ministère américain des Finances, a été financé par le Kremlin, Marcel Ciolacu aurait dû soutenir les candidats pro-européens. Cela aurait permis à la Moldavie d'aller de l'avant plutôt que de régresser.»