Régionales partielles en Allemagne : l'AfD a le vent en poupe

Dimanche dernier, deux grands Länder allemands ont renouvelé leurs parlements régionaux, la Bavière et la Hesse. Lors de ces scrutins, la formation d'extrême droite Alternative für Deutschland (AfD) a gagné beaucoup de voix. Soupçonnées de dérives extrémistes, l'AfD est placée sous surveillance par l'Office fédéral de protection de la constitution, un service allemand de renseignement. L'AfD s'est hissée en troisième position en Bavière, derrière la CSU et les Freie Wähler, et en seconde position en Hesse, derrière la CDU. Les commentateurs tentent de jauger les implications de ce vote pour le gouvernement fédéral en place.

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Népszava (HU) /

Sidération générale

Face aux succès de l'AfD, les autres partis ne savent pas comment accuser le coup, critique Népszava :

«Le désarroi complet des partis démocratiques est particulièrement inquiétant. Ils ne savent pas comment enrayer l'ascension de l'AfD. ... Le chancelier allemand Olaf Scholz est l'incarnation du calme et n'aime pas prendre des décisions trop hâtives. Il n'en reste pas moins que les choses ne pourront indéniablement pas continuer ainsi. Les partis de la coalition le savent, mais les premières réactions indiquent que chacun jette la pierre à son voisin au lieu de faire son mea culpa. Ce n'est pas le meilleur moyen de regagner la confiance.»

Diena (LV) /

Un revers de plus

Diena voit la coalition tricolore compromise :

«Le résultat le plus révélateur de ces deux scrutins est le pire score jamais enregistré par les sociaux-démocrates, le parti du chancelier Olaf Scholz. 8,4 pour cent des électeurs ont donné leur voix aux sociaux-démocrates en Bavière, et 15,1 en Hesse. ... Le soutien des autres partis représentés dans la coalition au pouvoir - les Verts et les Libéraux - est lui aussi en perte de vitesse. ... De manière générale, le désaveu des partis constitutifs du gouvernement et le virage à droite sont des tendances si nettes que l'on est en droit de se demander si cette coalition pourra tenir jusqu'aux prochaines élections.»

Neue Zürcher Zeitung (CH) /

Un tournant de plus

L'AfD fait désormais définitivement partie du paysage politique de toute l'Allemagne, écrit Neue Zürcher Zeitung :

«Ces derniers temps, on parle beaucoup de grands tournants. Un grand mot qui s'applique peut-être aussi aux élections régionales du 8 octobre en Bavière et en Hesse. Les bons scores de l'AfD font mentir une légende entretenue par de vastes pans du monde politique pour se rassurer. Non, l'AfD n'est pas un phénomène propre à l'ex-Allemagne de l'Est. Quand dans deux länder économiquement forts, plus d'un million et demi d'électeurs votent pour un parti qui obtient des scores records, il a bel et bien pris pied dans la partie Ouest du pays et n'est pas près d'en repartir.»

The Economist (GB) /

Un coup de semonce

Contre toute attente, les résultats de ces élections pourraient consolider le gouvernement du chancelier Scholz, croit savoir The Economist :

«Etant donné que ses alliés de coalition, les libéraux du FDP et les Verts, ont été battus aux urnes, ceux-ci ont aussi peu intérêt que le SPD de Scholz à mettre fin à la coalition tripartite. Beaucoup d'Allemands sont inquiets face à la montée en puissance de l'AfD, mais les brillants résultats du parti ne devraient pas se traduire par davantage de pouvoir. Tous les autres partis refusent toujours catégoriquement toute coalition avec l'extrême droite, rien n'a changé à ce niveau-là. ... Scholz et sa coalition ont bien entendu les coups de semonce. Sur le dossier de l'immigration, la coalition tricolore a clairement durci le ton et les Verts ont modéré leurs ambitions écologistes.»

Der Tagesspiegel (DE) /

L'attrait des solutions simples

La montée de l'AfD révèle également une lassitude face à une réalité marquée par des crises, observe Tagesspiegel:

«Face au chapelet de désagréments en perspective, à des crises qui n'en finissent pas, de plus en plus d'inscrits donnent leur voix à l'AfD pour dire leur ras-le-bol du monde qui les entoure. Cette explication permettrait également de comprendre que des électeurs de tous les partis, même des Verts, sont passés dans le camp de l'ennemi honni. Ce dimanche, les nouveaux et les anciens électeurs de l'AfD n'ont pas voulu entendre les nombreux avertissements quant à l'agenda antidémocratique du parti et les relents racistes plus ou moins explicites de leurs fonctionnaires et partisans. Ils ont choisi les solutions simples proposées par le parti pour faire disparaître tous les problèmes, d'un seul coup, pour qu'on n'en parle plus.»