Commémorations du 6 juin 1944

A l'occasion du 75e anniversaire du débarquement allié en Normandie, de nombreux chefs d'Etat et de gouvernement ont participé mercredi à une cérémonie à Portsmouth, sur la côte sud de l'Angleterre. Donald Trump, Theresa May, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont commémoré ensemble le 6 juin 1944, qui devait marquer un tournant dans l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. Compte tenu de l'unité de jadis, les tensions actuelles au sein du bloc occidental semblent paradoxales.

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Frankfurter Rundschau (DE) /

Les dirigeants actuels n'auraient pas été un rempart à Hitler

Frankfurter Rundschau évoque la toile de fond des cérémonies de cette année :

«Mais quels sont ces orateurs qui parlent de lutte commune pour le bien ? Donald Trump attise le nationalisme partout dans le monde. Il nourrit une animosité inédite pour cette Europe libre pour laquelle tant de ses compatriotes sont tombés en 1944. ... Quant à Theresa May, depuis son entrée en fonction jusqu'à l'annonce lamentable de sa démission, elle ne s'est employée qu'à une chose : enfoncer un coin entre son pays et le reste de l'Union européenne. A Washington comme à Londres, la tendance est au repli sur soi et au cavalier seul. ... Si cette mentalité avait prévalu à Washington et à Londres il y a 75 ans, Hitler aurait eu un boulevard devant lui.»

The Guardian (GB) /

Inversion des rôles dans le monde occidental

The Guardian fait le constat que c'est l'Allemagne qui assure aujourd'hui le rôle de garant des valeurs dont les Alliés voulaient faire le socle de l'ordre d'après-guerre en Europe :

«Lors du tout premier anniversaire du Jour-J en 1945, alors que la victoire était encore fraîche, Eisenhower avait appelé, sous les acclamations de la foule londonienne, à ce que des liens indéfectibles soient tissés entre la Russie, la France, la Chine et toutes les autres grandes nations. C'est l'une des perversités de l'histoire qu'aujourd'hui, 75 années après le débarquement en Normandie, il faille que ce soit la chancelière allemande - et non le président américain ou la Première ministre britannique - qui incarne les valeurs qu'Eisenhower avait proclamées il y tant d'années, et pour la défense desquelles les soldats avaient pris d'assaut les plages de Normandie en 1944.»

Le Figaro (FR) /

Notre bonheur, fruit du sacrifice de nos ancêtres

Dans Le Figaro, la professeure de philosophie politique Chantal Delsol rappelle la fonction première de ces cérémonies :

«Les commémorations ont pour seul but de rappeler que chacune de nos grandeurs, de nos joies et de nos bonnes étoiles a été conquise sur le malheur et sur les tragédies. Que notre liberté a été arrachée aux démons de la servitude, et la paix aux entichés de violence. Que tout cela n'est en rien la faveur gratuite du destin, mais un cadeau offert au prix du sang par des ancêtres altruistes. La mémoire du jour le plus long nous rappelle que l'existence de l'homme est tragique et que tout ce qui est grand, loin d'être acquis pour toujours, doit se mériter constamment.»

El País (ES) /

L'Europe doit se doter de sa propre armée

75 ans après le 6 juin 1944, un vent bien différent souffle sur l'Europe, constate le journal El País :

«Depuis que les soldats alliés ont débarqué sur les plages de Normandie, la présence de l'armée américaine garantit la sécurité des démocraties européennes. Mais ce concept est remis en cause à un moment où la situation internationale s'avère des plus instables. L'autonomie militaire de l'Europe n'est plus une option théorique ; elle est désormais souhaitable, pour ne pas dire nécessaire.»