Que penser de la fin de l'Airbus A380 ?

Le constructeur aéronautique européen Airbus va mettre fin à la production de son avion de ligne gros-porteur A380. Le groupe a fait savoir jeudi que la dernière commande serait honorée en 2021. Le carnet de commandes du modèle n'a cessé de fondre ces dernières années, si bien que la production du plus gros avion de passagers au monde était devenu déficitaire. Les commentateurs regrettent la fin de ce projet de prestige, qui marque la fin de l'ère des grands avions.

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Financial Times (GB) /

Les 'superjumbos' ont fait leur temps

Airbus s'est trompé dans son évaluation de l'évolution de l'aviation civile et fait bien d'arrêter les frais, écrit Financial Times :

«La décision d'Airbus de cesser la production de l'A380 en 2021, après moins de douze années de service seulement, marque la fin de l'ère des superjumbos et le passage à des modèles plus petits et moins gourmands en carburant. Elle ne remet pas en question le modèle de la coopération aérospatiale européenne. Mais c'est l'aveu que le consortium Airbus avait misé sur le mauvais cheval en croyant que l'augmentation du trafic aérien mondial et l'engorgement des aéroports alimenteraient la demande en avions de grande taille.»

Polityka (PL) /

Un moment triste pour les mordus d'aviation

L'ère des grands transporteurs de passagers touche à sa fin, constate tristement Polityka :

«Plus de 3 000 personnes pourraient perdre leur emploi dans la production du géant, mais la plupart d'entre elles trouveront probablement un autre poste dans le groupe. L'histoire de l'A380 tiendra probablement lieu d'avertissement à l'adresse de l'ensemble de l'industrie aéronautique, pour sa mégalomanie, ses projets audacieux et trop ambitieux. ... C'est un moment de tristesse pour tous les mordus d'aviation, car il montre que les projets qui donnent des ailes à notre imagination et concrétisent nos rêves ne sont pas forcément rentables.»

taz, die tageszeitung (DE) /

Mauvaise nouvelle pour le climat

taz déplore la fin d'un transporteur écologiquement positif :

«Transporter le plus de passagers possible d'un continent à l'autre permet d'économiser le kérosène et de réduire les émissions de CO2 et de particules nocives. Mais depuis son tout premier vol pour la Singapore Airlines en octobre 2007, l'immense engin n'a jamais vraiment rempli ces attentes. Pour atteindre ces objectifs écologiques ambitieux, l'A380 devait faire le plein de passagers - ce qui a rarement été le cas. Parce que les consommateurs n'ont pas vraiment joué le jeu - comme pour d'autres idées écologiques. Au lieu de prendre l'A380 pour rejoindre un 'hub' et, de là, poursuivre leur voyage dans des avions de taille inférieure, ils ont de plus en plus réclamé des correspondances directes de A à B. ... Boeing aussi, de son côté, a annoncé la fin de son 'jumbo'. Pour l'environnement, la nouvelle n'est pas forcément bonne.»

Les Echos (FR) /

Une pensée court-termiste

La fin prématurée de l'A380 est un nouvel exemple du manque de persévérance des Européens, déplore David Barroux, rédacteur en chef du journal Les Echos :

«L'avionneur ne pouvait-il pas accepter de perdre quelques dizaines de millions de plus pour se donner une dernière chance ? A-t-il tout fait pour continuer de séduire Emirates, le premier client de l'A380 ? … On ne s'empêcher de regretter que l'Europe tourne une fois de plus la page d'un projet hors normes. Amazon, Tesla, Space X, Netflix, Alibaba, Huawei et tant d'autres des nouveaux géants mondiaux sont nés de projets fous au départ qui ont perdu de l'argent pendant des années mais qui finiront sans doute par payer et qui auront totalement rebattu les cartes dans leur univers. En dépit de la dictature des marchés financiers, les Américains et les Chinois ont retrouvé le sens du temps long. L'Europe peut-elle en faire autant ?»