Guerre en Ukraine : où mènent les négociations ?

Les négociations sur le règlement de la guerre en Ukraine continuent, malgré le scandale lié à la divulgation d'une conversation entre les négociateurs. Dimanche, une délégation ukrainienne a rencontré des représentants américains en Floride, tandis que cette semaine, des négociateurs de Washington sont attendus à Moscou pour présenter les propositions occidentales. La presse se penche sur les éléments susceptibles de porter ou de freiner le processus.

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Tages-Anzeiger (CH) /

Une lassitude de la guerre

Selon Tages-Anzeiger, aucun des belligérants n'a encore quelque chose à gagner :

«Cette guerre dure déjà depuis presque quatre ans, bientôt, elle aura dépassé la durée de la Première Guerre mondiale. Qui aurait pu l'imaginer ? Il y a une lassitude de la guerre dans l'air. Les morts, les estropiés, les appauvris. Le fait que Trump déteste cette guerre, parce qu'il déteste perdre de l'argent, peut s'avérer être un avantage. Il cherche une fin à tout prix. Mais un autre facteur devrait être plus décisif encore : que les Ukrainiens tout comme les Russes se rendent compte qu'ils n'ont plus rien à gagner.»

Eco - Economia Online (PT) /

Trump cherche une baisse des prix du marché mondial

Avec ses efforts de paix, le président américain veut aussi obtenir un abaissement des coûts de la vie dans son propre pays, estime Eco :

«La hausse de l'inflation dans les années consécutives à la pandémie a été l'un des principaux facteurs de l'échec de Biden et de la victoire de Trump. Le problème du coût de la vie persiste et a été décisif pour les victoires récentes des démocrates aux élections à New York [et dans le New Jersey]. La fin du conflit en Ukraine apporterait à nouveau du pétrole et du gaz russes sur le marché international, ce qui permettrait de faire baisser les prix et de faire refluer l'inflation.»

Financial Times (GB) /

Ponctionner enfin les avoirs russes

L'UE a toujours un grand atout dans sa manche, rappelle le quotidien Financial Times :

«C'est le contrôle de la grande majorité des actifs de la Banque centrale russe, gelés depuis 2022. … Dernièrement, l'UE a été bloquée par la Belgique, où la majeure partie des actifs sont détenus, ce pays craignant d'être tenu responsable si la Russie était un jour capable de récupérer l'argent. L'instinct de l'UE de maintenir le droit international est bien fondé. Mais comme la Russie, et aussi, désormais, l'administration Trump foulent aux pieds les normes internationales, il est dès lors nécessaire qu'elle envisage des mesures extraordinaires pour soutenir l'Ukraine et sa propre sécurité.»

Naftemporiki (GR) /

L'entêtement européen est contreproductif

Naftemporiki considère le plan de la paix de Trump comme une solution pragmatique et critique la position de principes des Européens :

«Se référer de façon sélective au principe de l'intégrité territoriale et de la souveraineté nationale en Ukraine tout en bafouant ce même principe dans la plupart des cas, est simplement hypocrite. On peut citer l'exemple de Chypre [et sa partie Nord occupée par la Turquie]. Lorsque le 'fou aux cheveux orange' et le 'dictateur parano du Kremlin' considèrent leurs intérêts, les risques et le rapport des forces, ils sont beaucoup plus raisonnables que les Européens déchaînés. Le projet présenté fournit la base d'un nouvel accord de sécurité et de stabilité à long terme entre l'Europe, la Russie et les Etats-Unis.»

Tages-Anzeiger (CH) /

Poutine ne paraphera pas à côté de Zelensky

Le chef du Kremlin trouvera toujours une raison de rejeter un accord, craint le quotidien Tages-Anzeiger :

«Le plan en 28 points a montré une fois de plus combien l'autocrate russe, Vladimir Poutine, était sûr de son fait. Où est la pression qui serait nécessaire pour qu'au final, Poutine coopère lui aussi ? Paradoxalement, il pourrait faire échouer un accord, in fine, simplement parce que Zelensky le signe. Poutine conteste à Zelensky toute légitimité de président de l'Ukraine, et ne lui reconnaît qu'une qualité de conseiller dans les négociations. Il refuse de parapher un accord sur lequel figurerait aussi la signature du 'président Zelensky'.»

The New Times (RU) /

Avec la paix, le pouvoir du Kremlin se déliterait

The New Times appelle à penser à long terme :

«Pour que l'Occident puisse escompter une réussite dans l'élaboration d'un monde pacifique, les Russes doivent être séparés de Poutine, la société russe de l'Etat. … Mais pour commencer, il faut déjà mettre fin aux pertes en vies humaines ; que cessent, graduellement, l'endurcissement et l'abrutissement. Car cela dessert Poutine. Voilà pourquoi les efforts visant à coordonner un plan de paix sont judicieux. Le Kremlin y verra une victoire. Mais la paix, en soi, sape déjà le système de Poutine, qui repose sur la production industrielle du chaos et de crises.»

Dagens Nyheter (SE) /

Washington s'en prendra à l'Europe

Dagens Nyheter a du mal à croire à une issue pacifique :

«Poutine n'est pas intéressé par une Ukraine souveraine ; les Ukrainiens ne veulent pas vivre à genoux. Il est possible que Rubio aide Kyiv et le reste de l'Europe à gagner du temps. Mais nous devons être conscients que ce n'est probablement qu'une question de temps avant que Donald Trump ne nous accuse d'avoir fait capoter tous les 'efforts de paix' et se retire.»

Maszol (RO) /

Trump cherche la paix chez lui

L'initiative du président américain est liée à des considérations de politique intérieure, croit savoir Maszol :

«Il aurait besoin d'un succès international spectaculaire et rapide, car les problèmes ne cessent de s'aggraver aux Etats-Unis. Le camp MAGA se montre de plus en plus indigné et divisé, la popularité de Trump est en berne, et s'il ne fait pas quelque chose rapidement, elle chutera un peu plus. Il doit se hâter de produire un résultat majeur. Deux possibilités se présentent à lui : attaquer le Venezuela, ou imposer la paix à l'Ukraine. S'il attaque le Venezuela, la base MAGA sera plus courroucée encore. … Le président américain pense qu'il serait préférable de conclure la paix en Ukraine plutôt que de poursuivre une guerre impopulaire.»

La Stampa (IT) /

Pékin veut aussi avoir voix au chapitre

L'appel téléphonique entre les présidents américain et chinois, lundi, est le signe que l'Ukraine devient le jouet des grandes puissances, juge La Stampa :

«Les nouvelles ébauches de négociations entre Washington et Kyiv, les réactions de Moscou et surtout l'appel entre Xi et Trump montrent que le conflit s'inscrit désormais dans une joute mondiale visant à définir les équilibres de pouvoir et les sphères d'influence. Cet appel était un geste formel, mais aussi et surtout une initiative stratégique cruciale ayant pour but, à un moment potentiellement décisif de la guerre en Ukraine, de signaler des intentions et des lignes rouges. … Il suggère aussi un message plus vaste : une gestion du pouvoir mondial de plus en plus concentrée sur les Etats-Unis, la Chine et la Russie.»

Frankfurter Allgemeine Zeitung (DE) /

Entre la peste et le choléra, Kyiv a tranché

L'Ukraine n'a désormais plus le choix qu'entre deux mauvaises alternatives, lit-on dans le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung :

«Céder au chantage frontal de Trump, qui a plombé la position de négociation de Kyiv vis-à-vis de Moscou en imposant des revendications et des concessions inconcevables ; ou bien se retrouver dans une situation politique et militaire plus déplorable encore, dans laquelle Trump priverait l'Ukraine, jugée 'ingrate', de son dernier soutien. ... Sommée de choisir entre la peste et le choléra, Kyiv a décidé de faire des courbettes devant Trump - ce que préconisent du reste aussi les Européens, eux-mêmes tributaires de l'appui américain dans leur confrontation avec Poutine.»